Chaque année, différents organismes, comme l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), publient un chiffre, qui représente le pourcentage des prélèvements obligatoires par rapport au produit intérieur brut de chaque pays.

Le calcul consiste à faire le total de toutes les sommes que les personnes physiques et morales doivent payer, de manière obligatoire, aux pouvoirs publics. Il s’agit donc essentiellement des impôts, fédéraux, régionaux et locaux, et des cotisations de sécurité sociale obligatoires. Le calcul ne prend pas en compte les recettes de l’Etat pour des prestations contractuelles, qu’il est possible d’éviter, ni les recettes des activités des entreprises publiques. Le total ainsi obtenu est divisé par le montant du produit intérieur brut du pays pour la même année.

Contrairement à ce qu’on laisse parfois entendre, ce chiffre ne fournit pas nécessairement une image adéquate de l’efficacité de l’Etat. Il représente en revanche la part de la richesse produite au cours d’une année, que l’Etat s’approprie sous la contrainte, pour l’affecter à des services relevant de sa politique. C’est donc une bonne appréciation de la part de “collectivisation” d’un Etat. Ainsi, si le calcul était fait pour la Corée du Nord, où pratiquement toutes les richesses produites sont prélevées à la source par le pouvoir, on devrait être proche de 100 %, tandis que le taux que l’on constaterait sur un territoire sans pouvoir serait de 0 %.

Dans les chiffres de l’OCDE pour 2013, la Belgique apparaît avec un taux de prélèvement obligatoire par rapport au PIB de 44,6 %. Il est vraisemblable que ce taux est un peu plus élevé pour l’année 2014. Une comparaison montre rapidement que la Belgique se situe à la deuxième place, dans toute l’OCDE, devancée seulement par le Danemark. Une comparaison dans le temps montre aussi que ce même taux était de 30,6 % en 1965 et de 40,9 % en 1977. Le plafond précédent, soit 44,3 %, avait été atteint en 1998, avant une très légère décroissance, avec un “plancher” à 42 % en 2009, puis une remontée rapide depuis lors.

Cette croissance des dépenses et des recettes publiques se retrouve dans la plupart des pays de l’OCDE, et montre donc un renforcement constant de l’Etat : celui-ci s’occupe d’un nombre croissant d’activités, et perçoit une quotité de plus en plus importante des richesses sous forme de prélèvements obligatoires. Il serait pourtant audacieux d’en déduire que cette collectivisation croissante est nécessaire pour qu’une société progresse. Ainsi, le taux retenu pour les Etats-Unis est aujourd’hui de 25,4 seulement, par rapport aux 23,5 en 1965.

Est-il vraiment nécessaire que près de 50% de ce que les citoyens produisent soit collecté de force par l’Etat ?

Il est également difficile de soutenir que la qualité des services publics, même celle de la sécurité sociale, requiert nécessairement des prélèvements comparables à ceux de la Belgique ou des pays nordiques. Tant la protection sociale que les services publics sont par exemple réputés bien meilleurs en Suisse, malgré un taux de prélèvement obligatoire de 27,1. La comparaison de la qualité des routes, par exemple, dans les deux pays, montre de manière assez édifiante que, dans ce domaine en tout cas, le “return” reçu par le contribuable belge pour son investissement n’est pas optimal. Ces réflexions amènent à se demander s’il est vraiment nécessaire que près de la moitié de ce que les citoyens produisent soit collectée par la force par les représentants du pouvoir.

La réflexion peut d’ailleurs être poussée plus loin, parce que le poids de l’Etat sur la vie des gens est en réalité encore plus important que ce que ces chiffres révèlent. Le ratio prélèvement obligatoire/PIB nous montre en effet la proportion de sommes payées, en argent, par les contribuables à l’Etat. Or les multiples règlementations de toutes sortes imposées par celui-ci sont un coût supplémentaire non chiffré. Lorsqu’un terrain est déclaré non constructible, par exemple, ou lorsqu’une activité est interdite ou soumise à de lourdes conditions, c’est aussi une richesse que l’autorité s’approprie par la force. Il faudrait un jour calculer aussi ce coût supplémentaire, celui de toutes les obligations que les citoyens doivent assumer et celui de tous les revenus que les lois les empêchent d’acquérir. On constatera alors que le coût de l’Etat, ou, si l’on préfère, le taux de collectivisation effectif, dépasse aujourd’hui très largement les 50 %, voire beaucoup plus.

Article de Thierry Afschrift, initialement publié sur le site de Trends-tendances.