La saga de la loi instaurant une taxe sur les comptes titres se poursuit. Pour mémoire, la première mouture de cette loi éminemment symbolique adoptée le 7 février 2018 avait été annulée par la Cour constitutionnelle par un arrêt du 17 octobre 2019, sans toutefois que la Cour en annule les effets passés, les contribuables ayant payé n’a donc pas été remboursés, bien que la loi ait été jugée contraire aux normes constitutionnelles. 

Le législateur a donc repris son bâton de pèlerin et a revu sa copie pour en produire une version 2.0 adoptée le 17 février 2021. 

Même si la nature de la taxe est incertaine si l’on devait suivre le gouvernement, il faudrait constater que, plus que prévoir une taxation sur les comptes titres, cette loi introduit, sur le plan des principes, dans notre législation fiscale le concept d’impôt sur la fortune, celui donc d’un impôt qui frappe la détention d’un patrimoine et non le fait que celui-ci produise un revenu, ce qui nous paraît inacceptable, sachant que les avoirs détenus ont a dans la plupart des cas déjà donné lieu à une imposition très forte.

Le rendement espéré de cette taxe, de l’ordre de 0,1% du budget de l’Etat, nous convainc également que cette mesure a plus la valeur d’un symbole qu’une utilité économique réelle. Il y a donc fort à craindre que cette loi, si elle est maintenue, verra son taux évoluer dans le futur.

Cette taxe frappe indistinctement les personnes physiques et les personnes morales en possession d’un compte-titres de plus d’un million d’Euros, même si ce compte est détenu en indivision avec d’autres personnes, voire même si l’actionnariat de la personne morale le détenant est majoritairement étranger. La nature de la taxe est au moins incertaine, les actions nominatives sont par ailleurs exonérées, ainsi que la plupart des autres valeurs patrimoniales, aucune exception ne figure dans le texte alors que Monsieur le Ministre les avait acceptées lors des discussions parlementaires, des présomptions qui ne souffrent pas de preuve contraire sont instaurées et les produits d’assurance vie de la Branche 23 y sont par ailleurs assimilés. Tout ce qui précède crée incontestablement une rupture des principes d’égalité, de légalité et européens.

La Ligue des Contribuables a donc décidé de mandater son conseil, Maître Thierry Afschrift, pour demander l’annulation de cette loi devant la Cour constitutionnelle, tout en sachant très bien qu’une troisième version est déjà en préparation, au cas où celle-ci ne franchirait pas le cap du contrôle de constitutionnalité, tout en comptant sur le fait qu’en cas d’annulation pour le futur, les taxes payées restent propriété de l’Etat.

Pierre-Yves Novalet.